La numérisation à l’hôpital est souvent présentée comme une forme de progrès, alliant sécurité, efficacité et rapidité. Mais l’ordinateur peut-il réellement rivaliser avec un·e infirmier·e expérimenté·e ? Est-il possible – et souhaitable – de rationaliser la souffrance d’un malade ? Qui paie le prix de cette informatisation à tout crin ? Pour quel temps (vraiment) gagné ?
Depuis une vingtaine d’années dans le travail social, mais à vrai dire c’est aussi valable dans tous les secteurs de la vie, penser ce que nous faisons se résume très massivement à une méthode : évaluer. C’est-à-dire comprendre ce que ça vaut… rapporter les actions sur une échelle quelconque...
Si n’importe quelle évaluation formelle dans le cadre de l’État social actif se veut à la fois objective et prescriptive, la digitalisation est un accroissement exponentiel de ces prétentions.
L’histoire populaire telle qu’elle s’écrit désormais ne manque jamais de se réclamer d’Howard Zinn. Et de fait, le zèle avec lequel il s’est employé à rendre au peuple une place centrale dans le déroulé des événements marquants des États-Unis a laissé une empreinte incontournable. Zoom sur les coulisses d’une œuvre devenue paradigmatique.
La Belgique a connu trois opérations de régularisation massive du séjour d’étrangers demeurant sur son territoire sans autorisation légale, des campagnes à chaque fois décidées par le gouvernement en réponse à une mobilisation collective entraînée par, avec et pour les sans-papiers. Saisir en quoi elles font date dans la durée d’un combat mêlant ruptures et constantes permet de mieux comprendre le retentissement d’une actualité qui reste en attente d’un rebondissement concluant. Mais revenir sur l’enchaînement des événements ayant rythmé cette lutte par des avancées, stagnations et replis met surtout en évidence, quelles que soient les victoires ou les défaites des sans-papiers, leur capacité d’agir. Une lecture historique engagée non pas tant par ce qu’elle pointe les efforts déployés par les sans-papiers face aux difficultés auxquelles ils restent confrontés que pour ce qu’elle s’appuie sur ce qu’en tant que premiers concernés ils persévèrent à investir les conditions de possibilité de leur émancipation individuelle et collective.
En avril 2018, suite à l’interpellation de certains partis politiques, quelques sans-papiers créent, avec l’aide de CFS asbl , un « Bureau d’étude des sans-papiers ». Tous les documents produits par le BESP sont validés par la Coordination des sans-papiers. En tant que femmes sans-papiers, tous les documents produits ont associé des femmes sans-papiers, et font aussi partie de leur « matrimoine ».
Les dispositifs numériques se présentent très souvent comme le simple ajout d’un nouveau possible. On implémente ces outils digitaux avec l’argument qu’ils sont simplement une aide, qu’ils n’apportent qu’un plus, qu’ils ne feraient qu’accroître les possibilités d’action des travailleurs sur le terrain. Mais ce qu’ils détruisent et ce qu’ils modifient n’est pas mis sur la balance. Par exemple, quand un dispositif informatique modifie l’admission des patients ou la prise en charge des gardes de nuit, on ne regarde que rarement quel savoir disparaît : qu’est-ce qu’on ne sait plus faire ? Mais aussi, qu’est-ce qu’on invente ? Chaque mode de savoir prend en compte certains éléments, produit ses données d’une manière singulière. Quels éléments sont privilégiés par la numérisation des hôpitaux ? La question ne se résout ni dans une addition porteuse d’espoir, ni non plus dans une soustraction teintée de nostalgie… Plutôt quelque chose de plus complexe à examiner : comment les travailleurs composent avec ces outils ? Mais aussi, quels savoirs ils produisent sur ces outils ?
Partout où on va, la présence de main-d’œuvre migrante dans l’agriculture, notamment pendant les périodes de récolte, est significative. Souvent, ces travailleurs sont dans des conditions de travail très difficiles, ce qui ferait penser qu’ils ne sont que des victimes passives à la merci d’un système oppressif. Cependant, parfois l’organisation entre travailleurs pour améliorer ses propres conditions est possible et se démontre efficace.
L’aménagement scientifique d’un quartier à partir d’une modélisation, l’orientation scientifique des élèves à partir de tests psys, la détermination scientifique de l’âge d’un sans-papiers à partir d’un test osseux. Mais aussi d’infinies applications qui modifient le travail, l’étude, les relations humaines, par des traitements informatisés du moindre geste effectué. Des choix de services sociaux organisés à partir de statistiques… Des manières scientifiques de se nourrir et d’évaluer les bénéfices de cette nourriture, de juger la qualité des sols qui la produisent, ou la santé d’une population. Toute une série disparate d’éléments présents dans notre quotidien qui ont en commun d’être regardés, tant bien que mal, comme des services rendus par la science. C’est vague comme ensemble, et bien entendu pas très scientifique. Mais la question est justement cela : la relation avec la science.
La pandémie de Covid-19 a d’emblée donné lieu à de nombreuses rumeurs. Quelle qu’en soit la teneur, leur déploiement reproduit un processus en substance fort ancien qui se trouve avoir été sondé en son temps dans sa déclinaison des fausses nouvelles. Toute ressemblance avec des situations ayant existé dans le passé serait-elle vraiment fortuite ?